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Tryo

C�est un ph�nom�ne, et qui dure depuis bient�t quinze ans. Une ad�quation exceptionnelle avec un public qui a su grandir (en �ge et en nombre), le fruit d�une amiti� profonde � cinq t�tes li�es par une conception du monde et du vivre libre. Plus que toute autre, la carri�re de Tryo ne doit rien aux m�dias qui ont fait un succ�s de L�Hymne de nos campagnes dix ans apr�s sa sortie, alors que le groupe avait d�j� vendu plus d�un million d�exemplaires de ses albums. Tant pis. Tant mieux. Aujourd�hui comme hier, Mali, Guizmo, Manu, Daniel et Bibou (le cinqui�me mousqueTerre) restent fid�les � eux-m�mes autant qu�� ceux qui les ont pl�biscit�s. Depuis 1995, leur � reggae akoustik � a crois� bien d�autres influences musicales, leur plume s�est affin�e pour accoucher d�une chanson m�tisse, rythm�e, festive et citoyenne. En 2008, apr�s un an et demi de pause permettant � chacun de r�aliser des projets personnels, leur cinqui�me album Ce que l�on s�me [cf. Chorus 65, p. 22] a marqu� une nouvelle �tape, suivie d�une tourn�e tout aussi impressionnante qui reprend d�s ce printemps dans les plus grandes salles fran�aises. Vacances des cinq oblige, entretien avec Mali, Daniel et Bibou, puis s�par�ment avec Manu et Guizmo.

Tryo s’est d’abord appelé Trio. De fait, ils étaient trois quand ils se sont rencontrés en 1994 à la MJC de Fresnes : Christophe Petit (dit Mali), Cyril Célestin (Guizmo) et Emmanuel Eveno (Manu). Passionné de théâtre et de spectacle, Mali est alors étudiant en philo et habite à côté de la MJC ; Guizmo s’est lancé dans la musique depuis quatre ans ; Manu s’y est mis plus récemment et joue avec lui dans le groupe de fusion (reggae, funk, jazz…) M’Panada, nom emprunté à une spécialité gastronomique espagnole. Technicien à la MJC, Sébastien Pujol (alias Bibou), va devenir le sonorisateur et futur homme à tout faire de Tryo.
C’est à l’été 95, lors d’une balade organisée dans les Pyrénées par la MJC que les trois mettent leurs voix en commun, avant d’ouvrir un concert de hard-rock à Fresnes [voir Chorus 29, Portrait] et de substituer un « y » au « i ». Leurs premiers baptêmes guitares-voix ont lieu en région parisienne et en Bretagne ; leurs différences surprennent (Mali adore Higelin, Guizmo et Manu penchent pour Renaud, Thiéfaine et des groupes comme Human Spirit ou Mister Gang) et malgré l’impact public, elles incitent à penser que le groupe ne durera pas.
En 1996, les quatre goupillent une tournée sur la côte Atlantique (L’Atlantique Tour), où ils chantent dans les rues et les bars de nuit ; la dernière semaine, Mali invite Daniel Bravo (Daniel Ito), un copain percussionniste, à les rejoindre. Désormais, l’équipe est  au complet et devant le succès décide d’enregistrer une cassette, à l’instigation de Bibou qui,
de la coulisse, commence à prendre conscience du phénomène. En octobre, après des répétitions à la MJC,
ils enregistrent ladite cassette (six titres) qu’ils vont très vite écouler artisanalement à près de deux mille exemplaires. Il est temps de penser au disque.

Mamagubida
Réunissant « des textes engagés sur des musiques légères », l’album autoproduit de « reggae akoustik » Mamagubida sort fin 1997. Son intitulé de sonorité africaine emprunte la première syllabe de chacun des prénoms : Manu, Mali, Guizmo, Bibou, Daniel. Il s’ouvre sur un titre recyclé de la cassette initiale et futur tube emblématique, L’Hymne de nos campagnes de Guizmo, qui a signé neuf chansons. Outre le morceau final décapant (J’ai rien prévu pour demain), également en studio, les treize autres sont enregistrés en public en Bretagne et à la MJC de Fresnes.
Globalement, sur des mélodies rythmées et enlevées, les mots frappent sec, que ce soit contre la pollution urbaine (Babylone), une société friquée et déshumanisée (La Misère d’en face, La Révolution, Yakamonéyé…) ou les politiciens de tous poils (Regardez-les)… Et Salut ô !, qui donnera son nom aux structures d’édition et de production du groupe, prend une dimension internationaliste de « Salut » aux « peuples opprimés », aux « frères » et à « toutes les mères ». Le tout complété dans le livret par une pleine page de remerciements, qui deviendra récurrente.
Fidèle à l’esprit des concerts (« pétards » compris comme le chante La Main verte), ce CD très live obtient un tel succès que Bibou passe son temps à envoyer des paquets dans toute la France et décide de le faire référencer à la Fnac. En quelques mois, il va s’en vendre quinze mille et les grandes maisons de disques, alertées par cet engouement hors norme, dépêchent bientôt leurs directeurs artistiques sur le terrain. Pas pressés de signer n’importe quoi, les Tryo effectuent le bon choix en la personne de Patricia Bonnetaud [voir encadré] du label Yelen de chez Sony. Grâce à elle, l’album ressort en l’état dans les bacs en décembre 1998 et son score commercial se trouve multiplié par dix. La tournée qui suit se révélant aussi formidable qu’interminable (cent quatre-vingts représentations dans l’année, en passant par les grands festivals francophones, Québec inclus), une première respiration s’impose à tous avant de repartir de plus belle.

DANIEL PANTCHENKO
 
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Photo : Sylvain Laquerre 

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